Bientôt
Ce fut l'incendie.
Une méchanceté du destin, terrifiante, dévastatrice, y compris dans l'âme navrée. La sollicitude des voisins, le soutien des enfants, le chagrin prégnant. Je perdais mon fils une deuxième fois, les souvenirs disparaissaient en fumée : sa voix que j'avais enregistrée avant de fermer son téléphone portable, ses livres, ses CD et DVD… lui quoi ! Parti sans laisser de traces. Ma douleur était atroce, féroce, absolue. L'homme à côté de moi, ne pensait plus qu'à faire l'architecte pour reconstruire la maison, une nouvelle maison, toute neuve. Je voulais la retrouver à l'identique, retrouver le parcours de pièce en pièce avec mon fils en fin de vie. Eh ! bien, non. Tout cela n'a même pas effleuré son esprit… Mon corps lui-même a dit ma souffrance : une rupture d'un tendon d'Achille m'a immobilisée et mise en état de faiblesse de longues semaines… Les décisions de reconstruction furent prises sans moi… et de toute façon "l'architecte" était bien décidé à n'en faire qu'à son bon plaisir. Il me restait peu de forces pour résister…
Ma souffrance était ma chose, incompréhensible à qui n'a pas l'affect disponible : la nouvelle maison n'est plus ma maison. C'est une maison : point. Neuve, certes. Heureusement toujours située dans mon jardin : ça, la nature bienveillante, bien que délaissée par la force de mes handicaps, me l'a conservé, échevelée et brouillonne. Mais je me fais un bonheur de lui rendre sa beauté ordonnée : c'est très fatigant, car mon pied est encore fort douloureux au bout du travail. Fatigue saine cependant : le soir, je masse et en route pour le lendemain. J'ai semé dans les serres, repiqué, arrosé, surveillé avec tendresse, et ça pousse !
Me reste : mon hameau paisible, mes voisins, les animaux , les chemins de balade.
Voilà, la maison a son chapeau tout neuf, à l'abri pour l'hiver, les travaux peuvent commencer à l'intérieur